CHEVROLET
CORVETTE C8
STINGRAY
CABRIOLET

L’essai Sport-Auto.ch du 20 septembre 2022

Rédaction : Anthony Monnier
Photographies : Bob de Graffenried

Quand General Motors met fin aux rumeurs et annonce que la huitième génération de la Corvette aura son moteur à l’arrière, les puristes – dont votre serviteur – hurlent au scandale, qui n’en est qu’un de plus dans l’histoire récente de la Corvette, après l’abandon des phares escamotables sur la C6 et les paires de feux arrière ronds sur la C7. Mais déplacer le moteur entre deux générations d’un même modèle, c’est du jamais vu !

Les réflexions émotionnelles passées, cette mutation paraît évidente et obligatoire si Chevrolet veut maintenir sa Corvette dans la cour des coupés performants, voire celui des supercars. Possesseur depuis plus de 10 ans d’une Corvette C5 Z06, j’ai pris le volant de cette Corvette C8 avec un peu d’appréhension. L’esprit « Corvette » est-il toujours présent ? Si mon collègue Sébastien a déjà fait connaissance avec elle, nous entrons ici dans le vif du sujet, trois ans après notre dernier essai Corvette en date ; celui de la C7 Grand Sport Final Edition.

Pour commencer, l’aspect extérieur de cette Corvette C8 ne laisse pas indifférent : un mélange complexe d’arêtes et de faces obliques, à l’image de la portière, qui ne possède pas moins de six faces distinctes. Ce design chargé donne l’impression qu’on a voulu chercher l’optimum de l’aérodynamique, à grand renfort de simulations, en oubliant quelques peu l’esthétique. Néanmoins, la ligne générale reste plutôt plaisante à contempler, tant pour le coupé que le cabriolet, notre véhicule d’essai.

0-100km/h (s) : 3.5

Vmax (km/h) : 296

rapp. poids/puiss. (kg/ch) : 3.7

propulsion
8 cyl. 6.2L atmo
482 ch / 613 Nm
1’771 kg

La teinte « Amplify Orange Tintcoat » contraste avec les entrées d’air et l’aileron arrière, traités en noir brillant, tout comme les jantes de 19 et 20 pouces. Le dessin des phares de jour s’intègre parfaitement dans les arêtes du capot avant. Un bémol toutefois sur l’esthétique des deux doubles sorties d’échappement, carrées, qui rappelle les échappements Remus des années nonante…

Le cabriolet garde quasiment la même ligne que le coupé, à l’exception de la baie vitrée au-dessus du moteur, qui disparaît au profit du toit replié. Celui-ci ne mord pas sur le coffre arrière, dont le volume demeure identique sur les deux modèles.

L’intérieur marque un net changement par rapport aux précédentes générations, avec un écran central orienté vers le conducteur, de même que la console centrale, très haute, qui accueille une ligne de boutons commandant la ventilation bi-zone. On se retrouve ainsi enveloppé par la voiture, prêt à faire corps avec elle. On relèvera toutefois quelques petits soucis d’ergonomie, comme les commandes de mémorisation des réglages du siège conducteur, placées trop en arrière sur la portière, nécessitant d’utiliser la main droite, ou les boutons raccourcis d’accueil et volume, positionnés du mauvais côté de l’écran et de ce fait peu accessibles par le passager mais également difficiles d’accès pour le conducteur, le comodo d’essuie-glace se trouvant devant.

Le volant hexagonal s’intègre parfaitement à ce cockpit, mais il pourra en dérouter certains par une sensation de manque de prise en main. Les sièges GT2 sont autant confortables qu’efficaces en maintien latéral, mais leur ventilation réfrigérée est un peu faible. En dehors de ces détails, il faut souligner la grande qualité de finition de cet intérieur qui mélange carbone, cuir et alcantara, et qui n’a plus rien à envier aux Européennes. De plus, une sonorisation à 14 haut-parleurs Bose Performance Series fait partie de la dotation de base sur cette Swiss Edition (nous y reviendrons).

Je profite de cet essai pour me rendre dans les Alpes françaises le temps d’un weekend, avec, au programme, les cols de la Madeleine, du Lautaret et du Galibier pour ne citer qu’eux. Le trajet jusqu’au pied des Alpes, qui se fait essentiellement sur voie rapide, permet d’apprécier le confort, grâce aux suspensions magnétiques MRC, malgré certains légers bruits aérodynamiques avec le toit fermé. Un arrêt à Albertville pour la pause de midi met en évidence certaines contraintes en utilisation urbaine, comme la vue arrière très restreinte à cause du coffre de toit amovible bombé. Petit détail : par temps pluvieux, une accumulation d’eau va se créer contre la vitre arrière, qui s’évacuera qu’à l’aide d’une franche accélération !

Le système d’assistant de parking, composé d’une caméra de recul, d’un radar de recul et de deux caméras frontales, facilite sensiblement les manœuvres, sans crainte de toucher la lame avant. Celle-ci sera aussi épargnée des ralentisseurs les plus redoutables, avec un système de relèvement de la suspension avant pouvant être couplé au GPS pour une levée automatique. En revanche, de nombreuses aides à la conduite font défaut pour une voiture de cette catégorie : pas de gestion automatique des feux de route, de détecteur de pluie, de régulateur de vitesse adaptatif ou de surveillance de voie, ni même de Start-Stop… même en option !

À l’attaque du col de la Madeleine, le passage du mode Tour au mode Circuit met en évidence la radicale différence de comportement de la voiture : la fermeté des suspensions fait rebondir le châssis sur le revêtement dégradé de certains tronçons, lui faisant perdre l’adhérence par moment. Je repasse en mode Sport, légèrement moins ferme et mieux adapté à ce type de route. On se fait vite remettre à l’ordre par un contrôle de trajectoire trop présent dans les modes Sport et Circuit, qui pourrait être plus permissif. MyMode, personnalisable, permet de configurer plusieurs paramètres, et ceux-ci restent actifs au prochain démarrage. On dispose aussi d’un mode Météo, qui va limiter la puissance transmise au sol avec un antipatinage d’avantage réactif. Mais la montée du col du Galibier, sous une pluie battante, s’est tout de même faite en mode Sport, le train arrière transmettant toujours bien la puissance, sans décrochage violent malgré la route détrempée.

Ces cinq modes « standards » sont activés à l’aide d’une molette sur la console centrale, peu ergonomique, avec un retard de plusieurs secondes dans le basculement du mode. Mais le mode le plus intéressant, baptisé Z, est accessible par simple pression sur le bouton Z du volant. En appuyant à nouveau sur ce bouton, on désactive l’ESP et passe en mode Z PTM, pour « Performance Traction Management » ; l’anti-patinage devient alors paramétrable sur 5 niveaux. Chez la concurrence, ce réglage fin est généralement réservé à des versions plus radicales. A noter que le mode Z est entièrement configurable.

La typologie d’affichage des informations sur le tableau de bord numérique va varier en fonction du mode sélectionné, mais pas seulement ; il est aussi possible de personnaliser les emplacements entourant le compte-tours par de nombreux modules de différentes tailles. L’info-divertissement, complet et simple d’utilisation, propose un système de mémorisation des performances, permettant l’enregistrement de la télémétrie ainsi que les images de la caméra frontale.

Comme déjà évoqué, la révolution de cette huitième génération est la position centrale arrière du V8 LT2 : la répartition des masses – de 40/60 – place le centre de gravité de la voiture au niveau des hanches du conducteur, ce qui procure une réactivité et une maniabilité propres à ce type d’architecture. Une fois entrée en courbe, la voiture pivote avec une facilité déconcertante. La boîte automatique à double embrayage et huit rapports Tremec, qui dispose d’un premier rapport fortement démultiplié, va relancer rapidement – presque brutalement – la voiture en sortie d’épingle.

Les rapports supérieurs sont rapprochés, permettant un copieux usage des palettes, nécessaire avec ce moteur LT2 : si son prédécesseur, le LT1 de la C7, gardait un comportement de gros cube américain avec le couple maximum disponible dans les régimes médians, le LT2 ne demande qu’à monter dans les tours : les 613 Nm sont atteints à 5’150 trs/min et les 482 ch sont délivrés à 6’450 trs/min, le rupteur se situant 200 trs/min plus haut. L’excellent travail d’intégration du groupe moteur – boîte – châssis aboutit à un véhicule communicatif et d’une surprenante légèreté malgré ses 1’771 kg.

Malgré l’absence de Start-Stop, la consommation demeure particulièrement sobre pour un moteur atmosphérique de 6.2 litres : 10.0 l/100km sur le parcours test alors que le constructeur annonce 12.1 l/100km en cycle mixte. La forte démultiplication des deux derniers rapports de la boîte ainsi que la désactivation partielle des cylindres (V8 à V4) ne sont pas étrangères à ces chiffres. A noter que sur autoroute, la Corvette C8 atteint 8.7 l/100km, identique à la consommation de ma Corvette C5 Z06, de vingt ans son aînée.

Je demeure toutefois partagé au sujet de l’échappement, trop timide dans les hauts régimes et trop présent au ralenti, avec des basses fréquences qui peuvent s’avérer dérangeantes en conduite quotidienne ainsi qu’au démarrage. Néanmoins, malgré la présence du filtre à particules, les montées en régime sont grisantes, en particulier lorsqu’on abaisse la petite vitre arrière afin d’entendre le moteur, comme la McLaren 720S Spider !

Toutes les Chevrolet Corvette C8 vendues en Suisse sont des « Swiss Edition », comprenant plusieurs options dont le système de suspension magnétique MRC, les sièges GT2, le système Front Lift à mémoire de lieu et le pack de Z51 incluant plusieurs composants plus performants. La Chevrolet Corvette C8 Cabriolet Swiss Edition est proposée à partir de CHF 126’700.-.

En face, on trouve, en configuration équivalente, la BMW M4 de 480 ch à CHF 138’860.-, la Mercedes-AMG C 63 Cabriolet de 476 ch à CHF 137’819.-, les plus exclusives Porsche 911 Carrera GTS Cabriolet de 480 ch à CHF 218’380.- et Aston Martin V8 Vantage à CHF 224’708.-. La Ford Mustang Mach 1 de 460 ch à CHF 76’150.- se situe bien en-dessous en matière de tarif, mais également de performances. A noter que parmi les voitures citées, seule la Porsche 911 propose un moteur arrière.

L’avis de Sport-Auto.ch

Déplacer le moteur de la mythique Corvette, de la position centrale avant à centrale arrière était un défi osé de la part du constructeur américain, qui n’avait pas droit à l’erreur. Mais force est de constater que cette Corvette de huitième génération tient toutes ses promesses, tant par ses performances accrues que par son excellent agrément de conduite. L’amortissement piloté lui procure une réactivité bienvenue sur les petites routes de montagne, mais également un excellent confort lors de longs trajets. L’habitacle demeure ergonomique, même pour le passager.

Les quelques lacunes par rapport aux standards des aides à la conduite actuelles se font vite oublier par le grondement du V8 atmosphérique, qui, en dépit des contraintes actuelles imposées par les normes, grisera rapidement son conducteur. La mythique Chevrolet Corvette américaine est toujours là, et bien là !

anthony[@]sport-auto.ch

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Merci à Cadillac & Chevrolet Europe pour le prêt de cette Chevrolet Corvette C8 Stingray Cabriolet.

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