MERCEDES
AMG G 63

 

L’essai Sport-Auto.ch du 12 juin 2025

Texte: Laurent Missbauer
Photos: Laurent Missbauer, Nicolas Mari, Bob de Graffenried,
Mercedes-Benz et Porsche

Tout comme la Porsche Taycan Turbo S n’est pas propulsée par un moteur turbocompressé, la Mercedes-AMG G 63, contrairement à ce que ses deux derniers chiffres laisseraient supposer, ne dispose pas d’un moteur de 6,3 litres de cylindrée. Il n’en demeure pas moins que les appellations Turbo S chez Porsche et 63 chez Mercedes sont synonymes de ce qui se fait de plus cher et de plus puissant chez ces deux constructeurs. Deux cases que notre G 63 d’essai coche parfaitement avec un prix total de 273’800 francs et un moteur 4.0 litres biturbo qui développe la bagatelle de 605 ch!

Mais pour quoi donc Mercedes a-t-il choisi les deux chiffres 6 et 3 pour distinguer ses modèles les plus chers et les plus puissants, tels que, pour ne citer que quatre exemples, la C 63, la GT 63, la SL 63 et la G 63 de notre essai? Tout simplement pour rendre hommage à la Mercedes 300 SEL 6.3 dévoilée en 1968. Celle-ci, avec son moteur de 6,3 litres de cylindrée, était alors la berline la plus performante du marché et également l’une des plus chères puisqu’elle coûtait près du double d’une Porsche 911. Avec ses 250 ch, près du double ici aussi d’une Porsche 911 qui en avait 130 à l’époque, elle rivalisait, malgré ses 1800 kg, avec les meilleures GT. Et si la 911 précitée accélérait de 0 à 100 km/h en 9,1 secondes, la 300 SEL 6.3 accomplissait le même exercice en 6,5 secondes!

José Rosinski, le célèbre essayeur du magazine français Sport Auto, avait su très bien retranscrire le caractère exceptionnel de la 300 SEL 6.3. Jugez-en plutôt: «Un feu rouge quelque part en ville. Dans un grondement rageur, un jeune conducteur au volant d’un coupé sport attend que le feu passe au vert, la main droite sur le levier de vitesse. A coté de lui, s’immobilise silencieusement une berline Mercedes dont le conducteur a ses deux mains posées sur le volant. Tiens, soupire le conducteur du coupé qui a jeté un méprisant coup d’œil au mastodonte, encore un bourgeois ennemi du moindre effort et amateur de boîte automatique… Et quand le feu passe au vert, il relâche net la pédale d’embrayage tout en écrasant l’accélérateur. Libéré, son coupé bondit en avant. Chose curieuse, la berline, dont le conducteur a également accéléré à fond, demeure à sa hauteur. Et quand notre jeune conducteur passe avec virtuosité la deuxième, il la voit même prendre un peu d’avance! Déjà, le coffre massif est à la hauteur de sa portière. Et, quand il enclenche la troisième, il voit avec stupéfaction la poupe de la Mercedes s’éloigner… Un sigle discret, sur le côté droit de la malle, attire alors l’attention du jeune homme, littéralement ahuri: 6.3!»

0-100km/h (s) : 4.4

Vmax (km/h) : 220

rapp. poids/puiss. (kg/ch) : 4.36

4×4
8 cyl. 4,0 l biturbo
605 ch / 850 Nm
2640 kg

Un pareil ahurissement s’est manifesté chez tous ceux que nous avons pris à bord de notre G 63, à chaque fois que nous avons enfoncé avec détermination la pédale de l’accélérateur. Fidèles à leurs prédécesseurs, qui avaient implanté en 1968 le moteur 6,3 litres de la Mercedes 600 dans la paisible berline 300 SEL, les ingénieurs d’AMG ont installé dans leur tout-terrain le V8 biturbo de 4,0 litres qui nous avait enthousiasmé aussi bien dans les AMG GT que dans les Aston Martin que nous avions essayées par le passé. Résultat? Notre Mercedes AMG G 63 survitaminée accélère de 0 à 100 km/h en 4,4 secondes. Une accélération inférieure par exemple à celle de la Porsche 911 Carrera T qui nous avait permis d’effectuer pareil exercice en 4,9 secondes.

Mais quelles sont les raisons qui ont incité les responsables de Mercedes-AMG à commercialiser un modèle aussi improbable que la G 63? Nous en citerons trois: proposer un véhicule polyvalent, répondre à la demande et ne pas laisser à la concurrence un segment particulièrement lucratif. Et parmi les concurrents, on citera avant tout Porsche dont la Cayenne Turbo S avait été, il y a 20 ans, le premier véhicule tout-terrain de la marque à développer, plus de 500 ch, en l’occurrence 521!

La polyvalence de la Classe G n’est plus à démontrer. Elle se joue aussi bien des marches de la basilique de Saint-Pierre, quand elle officie en tant que papamobile, que des sentiers qui vous permettent d’accéder à votre chalet isolé sur les hauteurs de Crans-Montana. Et elle se joue également des pièges du Paris-Dakar. C’est d’ailleurs au volant d’une Mercedes 280 GE que Jacky Ickx s’y était imposé en 1983. On ouvrira une parenthèse pour rappeler que c’est également au Paris-Dakar que les ingénieurs de Porsche – qui utilisaient, comme véhicule d’assistance rapide pour leurs 911 à quatre roues motrices, une Classe G plus ou moins de série – ont eu l’idée d’y implanter un moteur nettement plus puissant, en l’occurrence le V8 de la Porsche 928. Ainsi équipée la Classe G d’assistance rapide termina même 2e du Rallye des Pharaons remporté en 1985 par la Porsche 959 de Saeed Al Hajri.

Le fait que la G 63 permette à Mercedes de répondre à la demande est lui aussi établi. Quelque cinquante G 63 auraient fait l’objet d’une nouvelle immatriculation en Suisse en 2024. Le conditionnel est de mise car les statistiques publiées par Auto-Suisse, la faîtière des importateurs, font état d’un total de 424 «G-Klasse» sans en différencier les modèles. Cela contrairement aux statistiques des Land Rover avec 821 Rover Sport qui s’ajoutent aux 522 Range Rover «normales». Pas de différentiation non plus pour les Mercedes GLE (1559) et les Porsche Cayenne (1053) qui démontrent elles aussi que la demande pour les «gros 4×4» est très forte en Suisse.

Enfin, le fait que la G 63 ouvre à Mercedes un segment particulièrement lucratif est parfaitement illustré par notre G 63 d’essai. Celle-ci s’adresse en effet à une clientèle à très fort pouvoir d’achat que 40’000 francs d’options n’effraient pas. Notre véhicule d’essai, dont le prix de base s’élevait à 234’900 francs, affichait en effet un prix total de 273’800 francs avec toute une série d’options. Dont certaines, à notre humble avis, devraient faire partie de la dotation de série d’un véhicule facturé plus de 200’000 francs. Il vous faudra par exemple débourser 828 francs pour avoir le volant chauffant et le pare-brise chauffant. Et si vous souhaitez que le couvre-roue de secours soit peint de la même couleur que la carrosserie, vous allongerez encore 529 francs. Vous avez dit mesquin?

Là où la G 63 ne manque pas de générosité en revanche, c’est dans ses aptitudes à passer pratiquement partout. Cela grâce notamment à trois blocages de différentiel mécaniques et à un réducteur de vitesse tout-terrain «low range». Son importante garde au sol d’au moins 241 mm et sa suspension à grand débattement en font un véritable tout-terrain. Dans les pentes raides, le couple du moteur fait des merveilles. On sent que l’on dispose d’une puissance qui permet d’escalader des chemins escarpés sans soucis. Les informations sur le nouveau cockpit offroad, telles que les inclinaisons de pentes, les angles, etc…, sont à la fois intéressantes et utiles. Et, avec les fenêtres ouvertes, le bourdonnement des échappements sous les portes apporte une touche insolite à l’expérience de conduite.

Une fois revenue sur la route, la G 63 ne s’illustre pas que par ses accélérations foudroyantes évoquées au début de notre article. Elle témoigne aussi d’une belle faculté d’adaptation. Sur les routes de montagne, elle accuse certes un fort roulis qui n’incite pas à attaquer comme on le ferait par exemple au volant d’une AMG GT 63. Son importante réserve de puissance suffit toutefois largement à dépasser les touristes, qui se lambinent sur nos cols, en moins de temps qu’il ne le faut pour l’écrire. Son moteur V8 biturbo de 605 ch (585 ch thermiques auxquels s’ajoutent 20 ch issus d’un dispositif de légère hybridation) fait ainsi des merveilles avec son couple maximal de 850 Nm. Cela pour une consommation que l’on peut qualifier de raisonnable si l’on tient compte de la puissance, du poids de la bête – 2640 kg tout de même – et de ses lignes aussi aérodynamiques que celles d’un carton de chaussures!

Les données du constructeur relèvent une «consommation d’énergie combinée de 15,7-14,7 l/100 km». Nous avons enregistré pour notre part une consommation moyenne de 15,9 l, alors que notre dernier trajet de 124 km entre Bulle et l’agence Mercedes-Benz de Genève où nous avons ramené notre véhicule, s’est soldé par une consommation de 11,4 l/100 km en respectant scrupuleusement les limitations de vitesse. Un bon résultat, directement lié à la légère hybridation installée désormais sur les nouvelles Classe G, qui permet aux heureux propriétaires des G 63 de faire de substantielles économies. On doute cependant que ces dernières intéressent beaucoup une clientèle qui ne rechigne pas à dépenser plus de 235’000 francs pour un dragster déguisé en Classe G!

L’avis de Sport-Auto.ch

 

La Mercedes Classe G est un véhicule aux multiples facettes. Si elle s’avère rustique quand elle sert dans l’armée suisse, elle se métamorphose en un véhicule de luxe, doté des performances d’une voiture de grand tourisme, dans la version AMG 63 de notre essai. Avec ses 605 ch et sa consommation qui peut largement dépasser les 20 l/100 km si l’on écrase la pédale d’accélérateur sans modération, elle présente cependant une image politiquement incorrecte. Une image qui pourrait bien s’avérer rédhibitoire, même pour ceux qui sont fascinés par son côté tout-terrain baroudeur déguisé en dragster.

Pour...

Allure de baroudeur
Polyvalence
Accélérations époustouflantes

Contre...

Prix
Politique des options parfois mesquine
Prise de roulis importante
Image politiquement incorrecte

Merci à Mercedes-Benz Suisse pour le prêt de cette Mercedes-Benz AMG G 63 “Manufaktur”.

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