INITIATION
AU DRIFT AVEC
TORQUE DRIFT SCHOOL

Le reportage Sport-Auto.ch du 20 avril 2023

Rédaction : Bob de Graffenried
Photographies : Bob de Graffenried
Vidéos : Bob de Graffenried, Nadia Boudjenane, Torque Drift School

Dimanche 19 mars, 8h, circuit de karting du Bugey. « On y est, c’est ici que l’on va s’éclater !!! » me lance Julien. Le jour se lève timidement sur un décor parsemé de piles de pneus qui ne paie pas vraiment de mine… Tandis que plusieurs autos ultra modifiées sont en train d’être déchargées de leur plateau, j’emboîte le pas à Julien – fin connaisseur des lieux – jusqu’au bord de la piste, où trois Nissan 370Z un peu particulières sont alignées. « Bienvenue chez Torque Drift School » m’annonce chaleureusement Nadia en me saluant. J’ai l’impression de faire déjà partie de la famille. C’est parti pour une journée d’immersion totale dans l’une des disciplines les plus spectaculaires du sport automobile : le drift !

Qu’ils soient attirés ou non par la culture du drift, bon nombre d’amateurs rêvent de pouvoir maintenir leur monture en dérive. Pour d’autres, il s’agit d’apprendre à réagir correctement lorsque leur bolide décroche subitement pendant une course. Fondée en 2021, Torque Drift School (une entité de la société suisse Driftology Center Sàrl) propose des stages de pilotage sur des véhicules modifiés pour la pratique du drift.

La journée commence par un briefing d’une trentaine de minutes durant lequel Damien, mon instructeur pour la journée, présente la philosophie du drift ainsi que la gestuelle de base à adopter pour débuter. « Je drifte non pas parce que c’est le moyen le plus rapide de prendre un virage, mais parce que c’est le moyen le plus excitant », tels sont les mots de Keiichi Tsuchiya, qui est à l’origine du lancement de la discipline du drift sur circuit en 1988. En compétition, le classement n’est d’ailleurs pas établi en fonction du meilleur temps, mais de la « qualité » du run qui est évalué suivant différents critères.

Soigneusement préparées par une équipe de passionnés, les trois Nissan 370Z sont prêtes à en découdre. Si le V6 3.7L atmosphérique de 328 ch et la boîte manuelle à 6 rapports sont d’origine, des modifications profondes ont été apportées : frein à main hydraulique, embrayage renforcé, radiateur d’huile supplémentaire, suspensions raffermies, angle de braquage augmenté et pont arrière soudé (autrement dit, le différentiel a été supprimé afin que les deux roues tournent à la même vitesse en permanence).

A l’intérieur, des harnais, un volant tulipé et un extincteur ont été installés. Enfin, on note la présence de pneus Zeknova Supersport, une référence dans le milieu du drift pour leur tolérance en température et leur niveau d’adhérence. « Nos 370Z se situent à mi-chemin entre un modèle de série et une voiture de compétition de drift, encore plus radicale. » me lance Nadia pendant que je les ausculte en prenant des photos.

La température monte pendant que Corentin, avec qui je vais partager la voiture, effectue sa première session de 5 tours. Il va maintenant être temps pour moi d’entrer dans le vif du sujet… Non sans une pointe d’appréhension, car nous partageons la piste avec une vingtaine d’amateurs venus avec leur propre bolide pour participer à un Trackday organisé par Drift n’Fun. Toutefois, afin de réduire le risque de contact lorsqu’un tête-à-queue se produit, les pilotes doivent attendre sur la ligne de départ où un commissaire de piste leur fait signe de se lancer. Seulement s’ils se sont mis d’accord, des groupes de deux ou trois pilotes peuvent s’élancer simultanément afin de réaliser une « battle ».

Première étape cruciale : la mise en glisse, que l’on appelle « engagement ». Pour débuter, pas question d’utiliser le frein à main, ni même d’entrer sur les freins ou de faire un appel contre-appel. La recette fournie par Damien est simple : mettre environ un quart de volant dans la direction du virage, et donner une « louche » de gaz (c’est-à-dire un bref appui à fond) afin de faire partir l’arrière d’un coup. Simultanément à la prise d’angle, il faut contre-braquer rapidement et jouer avec les gaz jusqu’à ce que la voiture se « cale ».

La deuxième étape consiste à maintenir la voiture en dérive jusqu’à la sortie du virage. Pour ce faire, Damien me rappelle de toujours regarder là où je veux emmener l’auto, ce qui facilite le dosage des gaz et la manipulation du volant. Enfin, troisième et dernière étape, la sortie. Afin de terminer la glisse de manière fluide, les roues avant doivent être à nouveau droites avant que les roues arrière n’aient repris l’adhérence ; les gaz ne doivent surtout pas être relâchés brutalement !

Entre deux sessions parsemées de quelques tête-à-queue, Julien m’emmène avec lui dans la 370Z avec laquelle il s’entraîne en vue de sa participation au championnat de drift de France. C’est alors que je découvre pleinement la notion de « connexion » des virages expliquée par Damien lors de la théorie. Avec plus de 10 ans d’expérience dans la discipline (également en compétition et en tant que coach), Julien place la 370Z exactement où il le souhaite. Pour ce faire, il tire parfois le frein à main plusieurs fois de suite avant l’entrée du virage afin de pouvoir conserver l’angle de dérive sans mettre les gaz.

Juste avant midi, j’effectue mes premiers essais avec le frein à main hydraulique. Ajouter cette étape dans le processus n’est pas évident, d’autant plus qu’il ne faut pas oublier de débrayer pendant que le frein bloque les roues arrière. En tournant légèrement le volant et en tirant brièvement le frein à main pendant le freinage, je peux me permettre d’engager plus tôt.

A ma grande surprise, Damien me laisse ensuite tourner seul au volant de la 370Z, une pratique très rare lorsque l’on ne pilote pas son propre véhicule. En livrant les candidats à eux-mêmes, l’équipe de Torque Drift School mise sur le fait que ces derniers vont acquérir plus rapidement les bons gestes, sans que ceux-ci ne leur soient systématiquement dictés par l’instructeur.

De fortes averses de pluie viennent animer l’après-midi. Hormis une visibilité réduite, cela ne change pas la donne, cette journée se déroulant sur piste mouillée pour faciliter l’apprentissage et limiter l’usure des composants. La pluie a même plutôt tendance à homogénéiser l’adhérence. En plus de l’utilisation du frein à main avant certains virages, Damien me sensibilise sur les trajectoires à adopter afin de pouvoir prolonger la glisse le plus longtemps possible en sortie, ce afin d’avoir une chance de pouvoir connecter – enchaîner – avec le virage suivant. Comme la voiture se déplace plus vite lorsqu’il y a plus de distance entre les virages, l’exercice demande courage et dextérité. C’est ici que l’on mesure l’énorme différence entre le drift et la « simple » mise en glisse d’un véhicule dans un virage, sans avoir pour but de maintenir la glisse sur les lignes droites séparant les virages.

Au terme de la journée, bien que je sois encore incapable de connecter tous les virages entre eux, je ne peux qu’être satisfait de ma progression. Grâce à cette recette ambitieuse combinant une voiture adaptée au drift et des instructeurs très compétents (voir ci-après), Torque Drift School est probablement la meilleure école pour progresser rapidement dans cet art, le tout dans une ambiance décontractée.

La formule « Expérience » à laquelle j’ai participé coûte 889 euro. Ce tarif comprend la mise à disposition du véhicule pour minimum 30 tours avec un instructeur qualifié, l’assurance RC circuit, tous les consommables ainsi qu’un open bar. D’autres formules sont aussi proposées (sur piste sèche ou mouillée), tout comme la formation au volant de son propre véhicule. Vous trouverez toutes les informations sur le site de Torque Drift School.

Remerciements

Merci à Julien Junker ainsi qu’à l’équipe de Torque Drift School, particulièrement à Nadia Boudjenane et Damien Decarpentrie, pour leur accueil chaleureux ainsi que pour les conseils de pilotages prodigués tout au long de la journée.

Les instructeurs de Torque Drift School :

Hugo Lavedan
pilote sur le championnat de France de Drift

Snoussi Ben Moussa
pilote de réserve en LMP2

Alexandre Bengué
champion de France des Rallyes et pilote officiel Peugeot WRC

Damien Decarpentrie
pilote en proto ouvert, 15 ans de pilotage sur la glace en Laponie, développement pneumatique pour Michelin, coach du pilote de Drift suisse Nicolas Maunoir (3ème au championnat européen de Drift 2017).

Tous nos essais de A à Z :