ROADTRIP
AVEC LA MASERATI
GRECALE FOLGORE

 

Le reportage Sport-Auto.ch du 19 juin 2025

Texte: Laurent Missbauer
Photos: Nicolas Mari, Laurent Missbauer, Maserati et DR

C’est le 19 juin 1965 que le pilote fribourgeois Jo Siffert a participé pour la première fois aux 24 Heures du Mans. Il pilotait alors une Maserati, une marque qui allait également l’accompagner en F1 puisque, de 1966 à la première course de 1968, il a participé à 19 grands prix sur une Cooper-Maserati. Et c’est avec sa Cooper-Maserati de F1, qu’il s’est imposé en 1966 à la course de côte des Rangiers. Exactement 60 ans après la première course de Jo Siffert sur une Maserati, nous vous proposons un essai original, sous la forme d’un roadtrip, de la nouvelle Maserati Grecale Folgore électrique. Ce roadtrip vous permettra, entre autres, de découvrir les nombreux liens qui unissent Maserati à notre pays. En effet, outre Jo Siffert, les deux pilotes suisses Benoît Musy et Toulo de Graffenried ont également couru pour Maserati. Et c’est au volant d’une Maserati que Juan Manuel Fangio a remporté en 1953 la course de côte de La Vue des Alpes, dans le canton de Neuchâtel.

C’est à Zurich que nous attend «notre» Grecale Folgore électrique de 550 ch. Si, esthétiquement, elle ne se distingue presque pas de la Grecale Trofeo, à l’exception du bouclier avant et du diffuseur arrière, le bleu métallisé de sa carrosserie attire de nombreux regards. Il ressemble beaucoup au bleu des Maserati du championnat du monde de Formule E. Sportivité peut en effet rimer avec électricité. Le fait que deux marques aussi sportives que Porsche et Maserati soient présentes en Formule E, compétition réservée aux monoplaces 100% électriques, est là pour le prouver, tout comme le prouvent les différents modèles électriques de ces deux constructeurs. La Maserati Grecale Folgore constitue par exemple une alternative intéressante à la nouvelle Porsche Macan, électrique elle aussi. Elle joue cependant à fond la carte de l’élégance à l’italienne, avec un intérieur de qualité et de nombreuses références à quelques-unes des Maserati les plus emblématiques.

L’avant de la Grecale réinterprète par exemple à sa manière la célèbre «bouche», avec le trident en position centrale, de la Maserati A6 GCS 2000 avec laquelle le Fribourgeois Benoît Musy avait couru pour l’usine Maserati dans les années 50. Fils de l’ancien président de la Confédération Jean-Marie Musy, il portait un casque rouge avec une croix blanche entourée de deux lignes blanches. Après son décès, survenu le 7 octobre 1956 lors d’une course disputée sur le circuit de Montlhéry, la décoration de son casque allait être reprise par un autre pilote fribourgeois: Jo Siffert.

Et c’est devant le Jo Siffert Corner, l’espace muséal de l’Association Jo Siffert, que nous immortalisons la Grecale Folgore devant une photo géante de Jo Siffert. La décoration de son casque est bien la même que celle du casque que Benoît Musy portait dès ses premières courses à moto. Sur les photos prises devant le Jo Siffert Corner, on constate que la Grecale présente des éléments stylistiques propres à Maserati. Cela lui permet de se démarquer de l’Alfa Romeo Stelvio dont elle partage non seulement la plateforme, mais également de nombreuses pièces communes, à commencer par le pare-brise.

0-100km/h (s) : 4.1

Vmax (km/h) : 220

rapp. poids/puiss. (kg/ch) : 4.64

4×4
2x mot. électriques
550 ch / 820 Nm
2555 kg

Parmi les éléments spécifiques de Maserati, on note les trois prises d’air latérales que l’on retrouve aussi bien sur les Ghibli, que sur les Gran Turismo, Levante et Quattroporte. Sur la Grecale, elles sont surmontées du nom des différentes versions, par exemple Trofeo pour le modèle thermique de 530 chevaux ou Folgore pour notre voiture d’essai. Les feux arrière, en forme de boomerang, évoquent pour leur part la Maserati 3200 GT qui avait été présentée en 1998 et qui avait été dessinée par Giorgetto Giugiaro, sacré en 1999 «Designer automobile du siècle».

Quant aux feux LED, à l’avant, ils présentent une signature lumineuse similaire à celle de la Maserati MC20 Cielo. Les spécialistes de l’histoire du sport automobile ne manqueront pas de faire un parallèle entre la MC20, à moteur central, et la Maserati Tipo 65, à moteur central elle aussi, dont disposait Jo Siffert aux 24 Heures du Mans de 1965 (Photo noir-blanc ci-dessus). Piloter il y a 60 ans un tel bolide, propulsé par un moteur V8 de 5 litres, devait constituer quelque chose de fantastique. Surtout pour quelqu’un comme Jo Siffert, issu d’une famille très modeste de la Basse-Ville de Fribourg. Ce quartier, autrefois pauvre et même marginal, est aujourd’hui un des quartiers les plus pittoresques de Fribourg et c’est là que nous effectuons notre deuxième séance de photos.

Circuler dans la magnifique vieille ville de Fribourg dans un silence absolu, est un privilège qu’offrent tous les véhicules électriques et en particulier la Grecale Folgore qu’aucun bruit parasite ne vient perturber. Sur le plus grand de ses deux écrans inclinés qui occupent la partie centrale du tableau de bord, une animation montre en permanence le fonctionnement des deux moteurs électriques, l’un sur l’essieu avant et l’autre sur l’essieu arrière.

On peut également y lire la consommation instantanée du moteur et de la climatisation, ainsi que d’autres informations telles que le niveau de charge et la température de la batterie. Un troisième petit écran, rond et positionné au milieu du tableau de bord, rappelle les montres des Maserati d’antan. Il ne donne cependant pas seulement l’heure (de façon numérique ou analogique) mais, en fonction du menu sélectionné, il renseigne également sur le niveau de charge, l’autonomie restante ou la puissance de freinage. Et quand on éteint la Grecale, c’est le trident de Maserati qui apparaît comme par enchantement!

Il est temps désormais de franchir trois des nombreux ponts qui enjambent la Sarine à Fribourg. En venant depuis le pont de Saint-Jean, le pont du Milieu permet d’arriver dans le quartier où Jo Siffert a passé son enfance. Nous traversons ensuite le pont de Berne qui est le dernier pont couvert en bois de la ville. S’il a été construit au milieu du 13e siècle, son aspect actuel date de 1653. Avec ce pont de Berne, la transition pour vous parler de notre prochaine destination, qui est justement Berne, s’avère parfaite.

La capitale de la Confédération a accueilli cinq grands prix de F1 comptant pour le championnat du monde, de 1950 à 1954, et le baron Emmanuel de Graffenried, que tout le monde appelait Toulo, s’y est illustré en terminant deux fois 6e au volant d’une Maserati. En 1950, tout d’abord, puis en 1952. Toulo de Graffenried est cependant avant tout connu pour avoir remporté, sur une Maserati 4CLT, le Grand Prix de Grande Bretagne de F1 en 1949.

Originaire de Villars-les-Moines, entre Morat et Fribourg, mais enterré à Marly avec son épouse Elsa, Toulo de Graffenried était un pilote très éclectique. Il a en effet également disputé des courses de côte, comme celle de Valangin-La Vue des Alpes qu’il a remportée en 1948 au volant d’une Maserati. Et c’est lui qui conseilla à Juan Manuel Fangio de venir courir à La Vue des Alpes en 1953, ce que le pilote argentin accepta volontiers. Au volant de sa Maserati A6GCM, le champion du monde de 1951 y réalisa le meilleur temps absolu en 4’46’’4. Toulo de Graffenried, lui aussi au volant d’une Maserati A6GCM, termina deuxième. Il assura ainsi à la marque au trident un magnifique doublé.

Près de 72 ans plus tard, c’est à notre tour de rouler sur le tracé de la course de côte Valangin-La Vue des Alpes avec une Maserati. La Grecale Folgore électrique est certes nettement plus silencieuse que celle de Fangio, qui a été sacré cinq fois champion du monde de F1 (1951, 1954, 1955, 1956 et 1957), elle n’en est pas moins très efficace, surtout lorsque nous sélectionnons le mode de conduite «Sport» qui raffermit les suspensions.

La direction s’avère par ailleurs très précise et nous ne ressentons les 2,5 tonnes du véhicule que lors des freinages appuyés à la descente, une fois le col franchi. A la montée, les 550 ch distillés par les deux moteurs électriques font très rapidement oublier le poids de la bête qui accélère de 0 à 100 km/h en 4,1 secondes. Et cette bête, qui ne prend que très peu de roulis, est parfaitement servie par sa suspension pneumatique. Au sommet du col, nous essayons d’effectuer une photo similaire à celle où l’on voit Fangio discuter en 1953 avec un autre pilote. Nous demandons à un collègue de la rédaction dans laquelle nous travaillons de prendre une pose identique à celle du champion du monde argentin devant un bâtiment qui, en 72 ans, n’a pratiquement pas changé (dernière photo ci-dessus)!

Ce qui n’a pas changé non plus, entre la Grecale thermique et la Grecale électrique, ce sont les grandes palettes derrière le volant. Si elles servaient à passer les différents rapports sur la Grecale Trofeo essayée en 2023, elles permettent, sur la Grecale Folgore, de sélectionner les quatre niveaux de puissance du freinage régénératif, ce dont nous nous donnons à cœur joie dans la descente depuis le col de La Vue des Alpes. Nous sélectionnons ainsi le niveau qui ralentit le plus possible le véhicule avant un virage serré, afin de récupérer le maximum d’énergie, et passons immédiatement, dès le milieu dudit virage, au niveau “roue libre” afin de reprendre de la vitesse sans même appuyer sur la pédale de l’accélérateur.

Au moment de rendre “notre” Grecale Folgore à Zurich, l’écran d’information du véhicule affichait une consommation de 23,8 kWh/100 km pour les 1901 derniers kilomètres parcourus, soit une valeur légèrement supérieure à celle donnée par le cycle WLTP qui est de 23,6 kWh/100 km. Les quelque 480 km d’autonomie promis par Maserati avec une charge complète ne semblent donc pas utopiques. A titre de comparaison, nous avions enregistré une consommation moyenne de 22,3 kWh/100 km lors de notre essai de la Polestar 4 Long Rang Dual Motor qui développe une puissance similaire (544 ch) mais qui est en revanche plus légère (2232 kg) et plus aérodynamique.

Sachez encore que sur le dernier trajet effectué à vitesse stabilisée sur autoroute, entre Berne et Zurich, la consommation moyenne de «notre» Grecale Folgore ne s’est élevée qu’à 18,1 kWh/100 km. Maserati précise par ailleurs que son système de recharge ultra-rapide n’a besoin que de 29 minutes pour recharger la batterie de 20 à 80%, soit 100 km d’autonomie récupérés en seulement 9 minutes.

En guise de conclusion, on relèvera que la Maserati Grecale Folgore constitue une alternative intéressante à la Porsche Macan, électrique elle aussi. Surtout pour ceux que les voitures au trident ne laissent pas indifférents. L’Italienne n’est certes pas la moins chère du marché avec son prix qui débute à 123’400 francs. Elle n’est pas non plus celle qui consomme le moins, mais elle propose un luxe typiquement italien et une sportivité de bon aloi qui raviront certainement les inconditionnels de Maserati, de Juan Manuel Fangio ou de Jo Siffert!

 

Merci à Maserati Suisse pour le prêt de cette Maserati Grecale Folgore.

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