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24h du Mans 2017 – Rencontre avec Neel Jani

Le_Mans_2017-1-62L’édition 2017 des 24h du Mans augure des conditions particulières. Dans quel état d’esprit est notre compatriote Neel Jani, vainqueur en 2016, à quelques heures du départ ?

Tout le monde s’en souvient : le 19 juin 2016, la Toyota n°5 (Davidson-Buemi-Nakajima), alors aux mains du Japonais Kazuki Nakajima, s’envolait vers une victoire promise quand, soudain,  à 3 minutes du drapeau à damiers, un problème technique l’immobilise… et la Porsche n°2 (Lieb-Dumas-Jani), alors pilotée par Neel Jani, franchit la ligne d’arrivée en vainqueur !

A quelques heures du départ, Neel Jani nous a parlé de son état d’esprit et des conditions particulières attendues pour les 24h cette année. Désigné pour prendre le volant au départ, il fera équipe avec l’Allemand André Lotterer et le Britannique Nick Tandy, sur la Porsche n° 1.

Depuis 2015, Neel Jani détenait aussi le record de la piste, en 3 minutes 16,887 secondes, sur Porsche. Nous vous en parlions hier, à l’issue des qualifications, ce jeudi 15 juin, le Suisse Neel Jani a vu son record tomber. Le Japonais Kamui Kobayashi (qui a terminé 2ème l’an dernier sur la Toyota n°6 aux côtés du Français Sarrazin et du Britannique Conway) a en effet connu le tour parfait lors des qualifications, signant le temps canon de 3 minutes 14,791 secondes, qualifiant ainsi la Toyota n° 7 en pole position.

Neel Jani : Le chrono de Toyota, c’est quelque chose que nous ne pouvions pas battre. Je crois qu’au moment où Kobayashi a fait le chrono, c’était LE moment.

Nous avons eu des conditions incroyables, les meilleures depuis deux ans. Lors de ces deux dernières années, il a toujours plu le jeudi. Mais aussi, cette année, il y a eu des courses durant toute la journée, et donc beaucoup de gomme déposée sur la piste. Dans les premiers tours, tout le monde était étonné du fort grip tout à coup. Et le vent nous poussaient sur la ligne droite, jusqu’à Mulsanne ! mais on a eu le vent de face dans les virages Porsche. Des conditions idéales, telles que je n’en avait plus vu depuis 2009 !

Est-ce que cela te fais quelque chose, de perdre ce record  ?

Neel Jani : Quand même, c’est quelque chose de spécial, d’avoir le record au Mans ! Si j’avais été battu pour 2 dixièmes, oui, cela m’affecterais… mais pour 2 secondes, je peux seulement dire « Chapeau ! », c’est quelque chose d’incroyable.

On va avoir une course avec, a priori, des températures très élevées. Est-ce que c’est quelque chose que tu redoutes ?

Neel Jani : Il semble que la chaleur n’est pas l’un de nos points forts. Mais ici, il semblerait que lorsqu’il ne fait pas chaud, mais vraiment chaud, c’est un problème pour tout le monde. Dans ces conditions, nous pensons que nous pouvons nous battre avec Toyota. Lorsque la nuit tombera, ce sera peut-être un peu plus difficile. Nous l’avons vu hier : lorsqu’il a fait vraiment froid tout à coup, ils ont trouvé davantage de vitesse. Ce sera très intéressant. Je crois que nous aurons une course où une fois ce sera l’un, et une autre fois ce sera l’autre le plus rapide. Mais s’ils retrouvent les conditions des qualifications, avec 8 km/h de plus en fin de ligne droite…

Comment se joue cette variation par rapport aux températures, en termes d’exploitation des pneus ou en termes de fonctionnement moteur ?

Neel Jani : Je pense, tout ! Je pense qu’il est très difficile de choisir les pneus, de les exploiter et de les faire durer. Et puis, le moteur sera moins performant lorsqu’il fait aussi chaud. Nous pensons que lorsqu’il fait super chaud, tout va ensemble.

Est-ce que cela te pose des problèmes également en termes de fiabilité ?

Neel Jani : Je pense que tout le monde a connu des problèmes de fiabilité, ces deux derniers jours. Alors, il y a aussi de la chance, surtout avec la chaleur. Les pneus, les freins, les amortisseurs… tout est plus chaud que normalement. On n’a jamais connu de course de 24 heures avec des températures si chaudes, comme il semblerait que cela s’annonce. Donc, tout est aux limites. Normalement, on roule 2-3 heures par une telle chaleur, et après, la nuit vient et cela est différent.

Et en tant que pilote, dans l’habitacle, redoutes-tu la chaleur ? vous avez une climatisation dans la voiture ; comment est-ce que cela fonctionne ? vous prend-elle de la puissance ?

Neel Jani : La climatisation fonctionne en continu ; si on l’a, on doit l’utiliser. Lorsqu’il fait trop froid, on peut l’arrêter, mais en principe pas. Je ne sais pas exactement si la climatisation prend de la puissance, mais quand il fait 31°C, il faut toujours se poser la question : combien perd-on en technique et combien gagne-t-on parce que le pilote est dans de meilleures conditions ? C’est clair que c’est un confort !

Pendant la course à présent, ferez-vous les mêmes relais que Toyota ? 14 tours chacun ?

Neel Jani : Cela dépend. Le but est de faire 14 tours. C’est là où Toyota nous a mis sous pression, l’an dernier. Nous allions beaucoup plus vite, mais nous avons eu des problèmes dans les 13ème et 14ème tours. Cette année, ce sera normalement différent.

Rouler de jour, de nuit ? as-tu une préférence ?

Neel Jani : Avec la chaleur, c’est clair que tout le monde préfère la nuit ! Mais à la fin, au moment où la voiture est la plus rapide sur la piste, tout le monde préfère y être aussi !

Arrives-tu à dormir pendant que les autres pilotes roulent, ou est-ce que la tension nerveuse est trop importante ?

Neel Jani : Pas de problème. Quand je sors de la voiture, je crois que je suis l’un des seuls pilotes qui ne prend pas toujours la radio. Ce n’est pas parce que je ne suis pas intéressé, mais je ne peux rien y changer. Donc, avant de revenir dans la voiture, je me renseigne sur ce que je dois savoir. Et j’arrive à bien me reposer.

Avant les essais, on avait parlé des problèmes possibles avec les LM P2 en les doublant. Les as-tu rencontré ?

Neel Jani : On a eu des problèmes, oui. Surtout dans la nuit, notamment avec les gentlemen drivers, qui freinent si tôt, ou tout à coup, ils ne voient pas les virages et vont tout droit. On a vu de tout. Ce sera vraiment spécial, et un petit peu dangereux, alors il faut faire attention à cela, c’est clair. Nous ne pouvons plus les doubler en fin de ligne droite. Les GT disent la même chose ; pour eux, c’est devenu aussi beaucoup plus difficile, car il y a beaucoup plus de voitures qui sont rapides.

Reçois-tu des informations, dans la voiture, sur le trafic ?

Neel Jani : Parfois. Mais peu, car nous ne devons pas regarder derrière.

Le fait d’avoir 2 voitures chez Porsche, alors que Toyota en a 3, te rajoute-il de la pression ?

Neel Jani : Pas plus de pression. Rouler pour Porsche au Mans, c’est ce qui compte. Je pense qu’eux ont plus de pression. Cela fait 19 fois qu’ils essayent de gagner, tandis que nous y sommes parvenus déjà plusieurs fois. Eux doivent encore prouver, tandis que nous devons défendre.

Et personnellement, pour toi, le fait d’avoir déjà gagné, est-ce que cela t’enlève de la pression ?

Neel Jani : C’est une pression personnelle. Même si c’est fait, en même temps, la pression est là quand tu roules pour Porsche.

Je veux gagner, oui !

Propos recueillis par Sébastien Moulin, retranscrits par Isabelle Crausaz. Crédit photos : ©Sébastien Moulin]]>

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