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Olivier Burri après le Monte Carlo « On va chercher des solutions pour rouler en Croatie »

Une semaine après le dénouement du Rallye de Monte Carlo, Sport-Auto.ch s’est entretenu avec Olivier Burri. Le pilote jurassien s’est classé vingtième du général et deuxième dans la catégorie WRC-2 Masters Cup. Il revient sur sa course, nous raconte ses péripéties et nous parle également de la suite de sa saison.

 

 

 

Salut Olivier ! Tu viens de finir ton 24ème Rallye de Monte Carlo. Parle-nous de ta course.

Disons qu’on a fait de bonnes et de moins bonnes choses… je suis toujours très dur envers moi-même alors je dois relativiser.

 

D’abord, on a fait deux jours de tests avant la course. On était sur une base plus enneigée que prévu avec environ 80% de neige/glace. La partie sèche ne correspondait pas à ce qui nous attendait pour la course. C’était serré et lent contrairement au parcours du Monte cette année. Malheureusement, c’était impossible pour nous de trouver d’autres bases. Il aurait fallu faire des essais en Italie mais ça n’a pas été possible car notre moteur est arrivé deux jours avant les essais prévus.

Du coup, on est partis avec un ‘setup’ trop tendre pour la course. On aurait dû partir avec un ‘setup’ typé Rallye du Haut Pays Niçois mais on n’était pas d’accord dans l’équipe.

 

Du coup, vous vous êtes fait une frayeur dès la première spéciale du jeudi ?

Dans la une, au premier intermédiaire, on était bien. Avant le deuxième ‘split’, on s’est fait peur dans un ‘piège glace’ annoncé un peu trop tard. On part en glisse en 4 et on se fait peur. Du coup, on a calmé le jeu sur la fin. Dans la deuxième, on repart à l’attaque et on est mieux mais on surchauffe les pneus dans la descente.

 

Le vendredi, on est parti avec des pneus hyper tendre. On s’est retrouvé avec du sous-virage en milieu et sortie de courbe. L’après-midi, on a plus attaqué, ça a mieux été mais on a trop tergiversé. Je n’ai pas fait un virage sans ‘checker’ en y allant à vue. On avait une marge de sécurité trop importante et les temps ne tombaient pas. Faut aussi dire que la sortie de mon pote Fourmaux m’a fait quelque chose.

 

Le samedi aurait dû être notre ‘jour de force’ et c’est l’inverse qui s’est produit. Dans le premier passage dans Sisteron, on était prêts au départ quand on a reçu un drapeau rouge (NDLR : à cause de la sortie d’Elfyn Evans). Dans le deuxième tour, on a roulé mais trop dans l’expectative du train arrière. On n’avait pas un bon feeling. On roulait avec deux clous et deux slicks en croisés. On aurait dû faire chauffer les ‘neiges cloutées’ comme les slicks mais on a mis 5-6 kilomètres avant d’être en température. On n’a pas assez pris de risques dans la glace alors que c’est ma tasse de thé.

 

Le dimanche, on a changé le setup et c’était mieux. Par contre, je n’ai pas écouté Micka (NDLR : son fils Michaël Burri qui officiait comme ouvreur) et on est parti en pneus durs. Vu que la voiture était réglée plus dure, on aurait dû mettre des tendres. On a roulé les deux premières spéciales comme des ‘escargots en mode tempomat’. (rire) Dans le deuxième tour, on est monté d’un step et on a commencé à sentir la voiture mais c’était trop tard, le rallye était fini.

 

 

Tu termines à la vingtième place au général et au deuxième rang des WRC-2 Master Cup. Est-ce ce résultat correspond à tes attentes ?

Je pense que j’aurais dû être dans les 16 au lieu des 20. J’ai eu trois semaines avant le rallye où je n’étais pas très bien. Du coup, j’étais un peu faible physiquement et le mental était moins bien que d’habitude. Miele était mieux préparé que moi. Ils ont mieux testé que nous avant le rallye et il a bien roulé.

 

Tes principaux concurrents au Monte Carlo étaient donc Mauro Miele et Freddy Loix. Est-ce tu as été surpris de leur vitesse ?

L’année passée, en Italie, sur un rallye de 80 kilomètres, j’étais plus vite que Miele de 50 secondes. Là, il était mieux que nous. J’ai appris qu’il avait reçu un gestion moteur de l’usine Skoda. J’ai vu que sa voiture marchait super bien. Il patinait des 4 roues à chaque départ. Après, on avait une différence de 50-100 kg parce que nos calculs de consos étaient faux. A l’arrivée à Monaco, il nous restait 38 litres alors que Miele n’en avait que 4 litres.

Je dirais que la différence de poids donnait une différence de vitesse de l’ordre de cinq dixièmes au kil et les cinq autres dixièmes, c’était moi.

 

Est-ce que tu étais satisfait des évolutions moteur et amortisseurs que vous avez apporté à la Polo R5 ?

L’essence qu’on avait était une catastrophe (NDLR : nouvelle essence fournie par la FIA). On a perdu 15 chevaux malgré l’évolution moteur. On a dû vidanger le moteur chaque soir à l’assistance et on avait des vapeurs d’huile dans le moteur. Tous les moteurs devront être révisés après le rallye. Je sais qu’un concurrent a été contraint de changer les coussinets de bielle après le rallye. Vraiment, cette essence est catastrophique et on paie ça une fortune. Les Skoda étaient mieux que nous et les Hyundai ont mieux géré avec une cartographie spécifique. On a tous dû revoir nos cartos pour ne pas casser.

 

Du côté de la suspension, c’était cool. La voiture est plus réactive. On a fait développer des amortisseurs Sachs, avec un nouveau ‘valving’, qui me conviennent bien.

 

 

Étant inscrit au WRC-2 Master Cup, tu vas donc encore rouler en mondial cette année. Est-ce que tu sais déjà quelles épreuves tu vas courir ?

Oui, on n’a pas investi de l’argent pour s’inscrire au championnat pour rien. On va donc chercher des solutions financières pour pouvoir rouler en Croatie. Après, il y aura sûrement Ypres et puis l’Espagne pour l’asphalte. Il faudra aussi qu’on roule sur la terre. On a le ‘kit terre’ pour la Polo donc ce n’est pas un problème.

 

Est-ce que tu as décidé si tu poursuivais avec ta Polo R5 ou une autre voiture ?

Avant le Monte, je ne savais pas si j’allais vendre la Polo. Depuis, on a décidé de la garder donc on va continuer à rouler avec.

 

Dans ton interview avant le Monte, tu nous parlais de ton admiration pour Sébastien Loeb. A tes yeux, que représente sa victoire au général devant les jeunes aux dents longues ?

Je l’ai vu un peu dépité il y a deux ans lorsqu’il a roulé avec la Hyundai. Il ne comprenait pas (NDLR : il était sixième au général). Avec les nouvelles Rally1, il faut ‘plus de cerveaux’ que seulement appuyer du pied droit. La bouteille et l’expérience paient. Ces pilotes-là sentent mieux les choses et ils ne se sont pas fait piéger.

 

J’en ai discuté avec Ogier qui me disait qu’avec les anciennes voitures (NDLR : les WRC de la génération 2017), il pouvait faire ‘n’importe quoi’ dans les virages et que le différentiel central faisait que ça passait. Là, avec les nouvelles voitures, les rampes de différentiel sont similaires aux R5. T’as une rampe identique pour l’asphalte, la neige et la terre et c’est beaucoup plus délicat.

 

En essais, Loeb a fait un aller-retour avec la Puma puis est passé au ‘boost à fond’. Il s’est tout de suite bien senti dans la voiture. D’ailleurs, il signe le meilleur temps dans le premier passage du shakedown.

 

Le dimanche matin, avant la dernière boucle, on parlait avec Sébastien Ogier et Benjamin Veillas (NDLR : le nouveau navigateur d’Ogier avait navigué Olivier à plusieurs reprises en 2008). Loeb était aussi là et on a un discuté. Il m’a dit avoir endommagé une jante dans une touchette contre une glissière dans la première boucle. Je lui ai dit ‘tu vas gagner le rallye avec cette ‘cha…’ ! Et il a gagné ! (rire)

 

Après le Monte Carlo, est-ce que tu vois se dégager un favori pour le classement général du WRC-2 Masters Cup ?

Avec son résultat au Monte et vu comment il a préparé ce championnat depuis plusieurs saisons, Miele est très bien placé. Il est d’ailleurs l’un des instigateurs de ce championnat. Après le rallye, Tsjoen (le navigateur et aussi partenaire du belge Freddy Loix) disait qu’ils iraient faire 4-5 rallyes du championnat. Loix ne semblait pas au courant (rire).

 

 

Et du côté des Rally1 ?

En termes de vitesse, Evans est le mieux placé mais Breen est très bien parti. Il sort très peu. Il a eu la chance de rouler deux ans en Italie en R5 avec des pneus MRF Tyres alors les bagarres, il connaît. Il a une niaque incroyable. La Ford semble très bien née, le châssis est très bien. Le moteur Toyota est très fort aussi. Après, chez Hyundai, il y a une grosse remise en question. Ils ont des problèmes internes et le départ d’Adamo n’a pas aidé. C’est compliqué. A l’époque, Adamo voulait un report du règlement des Rally1 et ils ont perdu six mois. Pendant ce temps, les autres ont travaillé et Hyundai a pris du retard.

 

Que penses-tu d’Adrien Fourmaux ?

Sa sortie m’a fait ch* parce qu’il espérait beaucoup de ce rallye. Il était bien devant et avait bien préparé son rallye. Il était dans le peloton de tête. Je suis sûr qu’il sera l’une de figures de proue du championnat. En ce moment, il n’a pas le moral mais c’est normal.

 

Pour finir, l’année prochaine, tu repars pour un Monte Carlo ?

En 2023, ça sera ma 25ème participation. Ça correspondra également aux 25 ans d’existence de mon partenaire IDneon alors on veut fêter ça là-bas. Après ça, on aura fait notre part…

 

 

 

La rédaction de Sport-Auto.ch remercie Olivier pour sa disponibilité et pour le temps qu’il nous a une nouvelle fois consacré. Nous lui souhaitons plein succès pour sa saison et nous ne manquerons pas de vous tenir informés de ses résultats. Restez connectés sur Sport-Auto.ch !

 

Crédits photographiques : Redbull – Joerg Mitter / Project-Diffusion – Ludovic Canal

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