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Rallye du Chablais 2024 – Le parcours présenté par Pascal Bachmann

Habitué des circuits avec son engagement en GT Open au sein de Street Art Racing, Pascal Bachmann ne résiste pas à l’appel du rallye une fois par an. Cette année encore, il a jeté son dévolu sur l’épreuve chablaisienne. Avec son franc-parler légendaire et son sens de l’humour, le pilote de la BMW M3 a accepté de partager avec Sport-Auto.ch ses impressions sur le parcours de l’édition 2024 du Rallye du Chablais, qu’il disputera secondé aux notes par Xavier Machet.

 


 

ES 01 – 05 : COL DE LA CROIX / 12,120 km

« Les organisateurs ont trouvé le moyen de nous mettre directement dans le bain. Je préfère quand le rallye commence par une « petite » spéciale, dans la vallée.

On ne conduit la M3 qu’une fois par an, une courte spéciale permet de se remettre dans le bain en douceur sans perdre trop de temps. Ici on parle d’un monument du Rallye du Chablais. Pour cette année le monument a bénéficié de quelques travaux de ravalement. En effet, le revêtement a été refait sur certaines portions, avec pour conséquence le fait de passer d’une surface monstrueusement bosselée à quelque chose qui ressemble plus à une route civilisée, pour la promenade du dimanche en famille.

Mais il reste encore quelques endroits, pour être fidèle à la tradition sans doute, où la voiture va, sans prévenir, se transformer en un kangourou épileptique sous amphétamines. Notamment dans la portion hyper rapide, au début de la descente, juste après le passage du col. On se souvient tous de la fameuse « toupie à fond de 7 » du maître funambule Olivier Gillet à cet endroit, et du commentaire magique de son acolyte Fred Helfer « tcheu, ça c’est du bol », une légende !  Vidéo ICI

La descente se poursuit sur Les Diablerets, avec quelques passages rapides où l’engagement permet de faire la différence. Tout ça pour dire que c’est une magnifique spéciale, avec de solides pièges. Pas de hors-d’œuvre pour cette édition, on attaque directement un plat solide, attention à l’indigestion.»

 

– Pascal Bachmann

ES 02 – 06 : LA COMBALLAZ / 7.270 km

« Alors là les amis, je ne sais pas quoi vous dire. Cette épreuve ne m’avait pas manqué, mais alors pas du tout, du tout, du tout. Est-ce que j’ai dit qu’elle ne m’avait pas manqué ? J’y ai pulvérisé une jolie petite 206 rouge de la Coupe Peugeot en 2007. Je sais, ça ne nous rajeunit pas, et ça n’est pas non plus mon souvenir préféré.

On dit du bon vin qu’il se bonifie avec le temps. Eh bien ça n’est définitivement pas le cas de ce bout de route d’à peine plus de sept kilomètres. Il ne sert absolument à rien en plus, ce bout de route, puisqu’il dessine une boucle dans la montagne, on ne va nulle part, on part et on revient dans le village de la Comballaz, par ailleurs charmant.

Non, on a ici plutôt à faire à un vieux vinaigre bien acide qui racle le fond du gosier et provoque des ulcères à l’estomac, nous ne sommes pas sur un Petrus, ou pour rester local, un magnifique Yvorne de derrière les fagots.

Le départ cache bien son jeu, mais après trois quatre virages, on entre dans le dur. Une route à peine assez large pour passer la voiture avec, de chaque côté, des vilaines pierres et des méchants trous qui ne demandent qu’à entailler le flanc des pneus imprudents qui s’en approcheraient. 

On a aussi deux ou trois « ciels » où on ne voit pas où on va et où toute erreur sera immédiatement sévèrement et sans doute définitivement sanctionnée.

Il faut ensuite que je vous parle de la descente. La pente est forte, les freinages allongés, et surtout, on passe par quelques épingles qui pourraient, sans rougir, figurer dans une émission du style « Les routes de la fin du monde ». Pour certains virages, on jurerait que l’armée s’y est entraînée au bombardement de saturation, tant il ne reste rien de la route, des trous, des bosses, de la terre, et toujours pas plus de place sur les bords.

Une fois passée la zone de l’apocalypse, on arrive sur une route un peu plus large et roulante. Attention, un peu, ça n’est toujours pas une autoroute, ça descend toujours raide et je peux vous dire que s’il pleut, les coulées d’eau sont très efficaces pour faire passer du rire aux larmes. Ma pauvre 206 le sait bien.

Pour finir, on attaque un bout plat et rapide qui redonnera le sourire à ceux qui auront survécu à l’enfer de La Comballaz.

Sans doute l’une de ces spéciales dont on dit qu’on n’y gagne pas la course, mais qu’on peut l’y perdre. Attention, chaud devant.»

– Pascal Bachmann

ES 03 – 07 : TOUR D’AÏ / 18.660 km

« Aï, aï, aï, si vous me passez l’expression. Nous voici au départ de la longue spéciale du rallye. Du côté de La Lécherette. On commence par une route bien large et très rapide qui passe sur un nombre impressionnant de ponts. Il devait y avoir une promotion sur les ponts le jour où cette route a été construite, ça n’est pas possible autrement. Deux ponts pour le prix d’un, le troisième gratuit.

La surface est majoritairement bien plane, la route est large, il y a de longs appuis, on y touche plusieurs fois le limiteur de régime, à fond entre les pâturages. Que du plaisir sur le sec, pour ma part.

S’il pleut, cela se complique un peu. Les vitesses sont vraiment élevées, et l’aquaplaning guette au détour des longs virages sur des coulées d’eau sournoises, attention. Et je ne parle pas de joints de ponts qui font brutalement perdre l’adhérence, ou pas. Impossible de savoir avant d’y être passé. C’est bon pour le cardio, moins pour les sous-vêtements…

Vers le milieu de la spéciale, on passe sur une route plus étroite, toujours relativement plane. Il existe cependant quelques pièges, notamment un passage d’à peine une cinquantaine de mètres où le kangourou de l’ES1 refait une apparition très brutale, il ne s’est pas calmé, le bougre.

Une très belle spéciale, à consommer sans modération. »

– Pascal Bachmann

ES 04 – 08 EVIONNAZ – VERNAYAZ / 5.400 km

« La voici la petite spéciale dans la plaine, qui est bien pour se mettre en jambes. Une épreuve assez courte, un passage sur la terre rapide avec un solide freinage au milieu de très gros arbres, dont il est important de se rappeler qu’ils seront toujours là longtemps après que nous serons partis. Certains concurrents l’ont appris à leurs dépens les années passées. Une rencontre rapprochée avec l’un de ces colosses se termine mal, en général. Autant faire ce qu’il faut pour les laisser en paix.

On passe ensuite par le village de La Balmaz. J’avoue que c’est un de mes moments préférés de la course. Il y a toujours du monde, on peut en rajouter un peu, pour faire plaisir et se faire plaisir, sans trop perdre. Un grand merci à tous les habitants de nous laisser faire les fous au milieu du village, avec une mention spéciale aux propriétaires de deux maisons dans ce passage. L’une avec un magnifique jardin, avec étang et poissons, et l’autre une magnifique cabane dans les arbres. Que voulez-vous, ça me plaît, c’est comme ça.

On passe ensuite le long du Rhône, sur des routes étroites et rapides avec deux gros freinages, l’un en appui, pour finir par une belle épingle propice aux photographes.

Moi, j’aime bien. »

– Pascal Bachmann

ES 09 – 12 : LAVEY – BEX / 7.520 km

« Une belle spéciale pour se réveiller le samedi matin. Un départ en légère montée, deux trois premiers virages sur une route large et plane avant d’attaquer une portion étroite en sous-bois, avec du serré, pas le fromage, les virages, et du rapide aveugle en descente. Encore un de ces endroits où le temps réalisé est inversement proportionnel à la taille des bijoux de famille de l’équipage. Que voulez-vous, il y a des lois de la nature comme ça qui sont immuables.

La descente se termine par un freinage en forte pente dans un virage à gauche sur une épingle à droite en montée, un spot idéal pour voir de la glisse. Attention à ne pas trop en faire cependant, il faut privilégier la motricité au côté photogénique du long travers pour s’extraire de l’épingle et attaquer la montée. Une affaire de compromis helvétique, en somme.

On arrive après un passage rapide en montée sur un petit bout de terre en descente dont le dernier virage a déjà fait nombre de victimes, méfiance donc. 

On passe ensuite au milieu des champs, en changeant plusieurs fois de route. Un passage délicat, en descente, sur du gravier, on freine bien droit pour le virage à gauche, forte pente avec des bornes en pierre qu’on ne voit pas, mais qui sont bien là, cachées dans l’herbe et prêtes à mordre au moindre écart. Mon ami Alain doit s’en souvenir, lui qui y a ouvert le train avant de son Escort, il y a quelques années.

L’épreuve se termine par une route plus large avec encore une belle épingle pour les photos.

En somme, une belle mise en bouche pour cette journée de samedi. »

– Pascal Bachmann

ES 10-13 COLLOMBEY-MURAZ / 18.010 km

« L’autre longue spéciale du rallye, le plat de résistance du samedi, en quelque sorte. Tout en montée, on part du côté de Collombey – Muraz. Une route plane, étroite, en sous-bois avec de tout, des épingles, comme des virages très rapides en aveugle et à fond. Ça monte, donc si on lève dans le rapide alors qu’on n’aurait pas dû, on perd vite beaucoup de temps. La confiance est la clé. On pourrait aussi reparler la taille des bijoux de famille de l’équipage. Loi de la nature immuable et tout ça…

Un passage dans un tunnel, à flanc de falaise. Une route sale avec des pierres qui peuvent tomber de la montagne inopinément ou se retrouver au milieu de la route sans prévenir suite au passage du concurrent précédent.

Selon la météo et la température de la nuit, on peut aussi trouver des zones humides, même s’il n’a pas plu.

Il y a quelques passages, vers le haut de la montagne, près du tunnel, où comme j’aime à le dire, « si tu te sors ici, ce qui est bien c’est que tu as le temps de te changer avant d’arriver en bas ». Bref, la vue est belle, mais on ne souhaite pas s’y attarder…

Quelques beaux pièges ensuite sur une partie plus plate, une opportunité de faire de la plongée sous-marine si on est trop optimiste sur un freinage pour un virage à droite devant le petit lac.

Un vrai sport complet cette épreuve, à ne pas prendre à la légère. C’est du solide, du goûtu, mais on a vite fait d’avaler de travers.

Enfin, comment ne pas avoir une pensée très spéciale pour Guillaume sur la ligne de départ? »

– Pascal Bachmann

ES 11 – 14 : LES PORTES DU SOLEIL / 13.750 km
 
«Alors là, on dit que c’est chez moi. Effectivement, mon adresse quand je suis en Suisse est aux Crosets, je connais donc par cœur 300 mètres et trois virages de cette spéciale, ce qui me donne clairement un avantage déterminant.

En plus, j’aime son nom, Les Portes du Soleil. Ça me rappelle l’hiver et le ski sur cet exceptionnel domaine. L’après-ski aussi, surtout, mais je m’égare.

Sur cette épreuve aussi on a vite fait de s’égarer. On commence par un départ « spectacle », très sympa pour le public toujours nombreux, sur le parking du téléphérique de Champéry pour passer ensuite au milieu du magnifique village. Route hyper étroite, pas le moment de trop en faire. On quitte le village par une ligne droite en montée suivie d’un solide freinage pour épingle à droite et c’est la montée vers la cantine de Sur Cou, sur une route étroite mais bien plane, et propre une fois n’est pas coutume. Mieux vaut ne pas s’habituer, parce qu’une une fois passé sous la cantine, on attaque un bout en terre relativement long et traître. On évite de se mettre trop en travers, même si c’est tentant d’en rajouter un peu, en effet, les pneus sont prévus pour rouler sur la route, leurs flancs ne sont pas renforcés pour affronter les cailloux, ils sont vulnérables sur ce passage en terre.

On sort de la terre par un freinage en appui qui referme sur un petit pont, un excellent moyen de prendre du poisson, en s’échouant dans le torrent en contrebas. Mais nous ne sommes pas là pour ça, on se concentre.

La montée qui suit est bien rythmée, étroite et plutôt lente. On change de route pour attaquer une portion plus large et très rapide, avec un changement de route sur une compression à fond de cinq qui va se charger de tasser tout ce qui traîne bien au fond de l’estomac. Et de l’estomac justement, il en faut, ça va vite, à flanc de montagne, surtout dans le petit bout de descente juste avant d’arriver à Champoussin. Il n’y a que quelques virages dans cette descente, après le couvert de Frâchette, mais il faut souder et ça va vraiment très vite, pas le moment de faire une bêtise. Pas raisonnable, mais quel plaisir quand ça marche.
 Après Champoussin, on termine sur ce qui en hiver est la piste de luge, vraiment, qui rejoint la route principale des Crosets quelques kilomètres plus loin. On change encore une fois de monde, c’est en descente, sale, étroit, avec plusieurs passages dans lesquels notre ami le kangourou va se réveiller brutalement et tenter de nous désarçonner encore une fois.

Un bien beau dessert pour finir le rallye !»
 
– Pascal Bachmann

Toute l’équipe de Sport-Auto.ch remercie Pascal Bachmann pour sa disponibilité et lui souhaite un bon rallye.

Rallye du Chablais 2024 : Mode d’emploi !

Crédits des photos : ©Nuno Ferreira / Sport-Auto.ch
Cartes : ©Rallye du Chablais

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