Le pilote Sauber a écrit dimanche 6 juillet la plus belle page de sa carrière de Formule 1. Après 239 départs, il brise la malédiction et son record. Oui, Nico Hülkenberg termine enfin sur un podium d’un Grand Prix de Formule 1. Le sport automobile lui offre, nous offre, une de ces histoires que l’on aime tant.
En terminant 3ème du Grand-Prix de Grande-Bretagne, Nico Hülkenberg a pu laisser éclater toute sa joie. Un jour historique pour lui, un podium venu de nulle part et une petite revanche personnelle pour l’homme aux 238 courses sans podium. Et la manière est encore plus belle qu’il le fasse sous les couleurs de son écurie suisse fétiche, Sauber.
Il y a des images qui valent plus que toutes les statistiques. L’émotion, la joie, la surprise, l’esprit d’équipe. Tout était au rendez-vous pour ce premier podium de sa carrière. Est-ce que Nico Hülkenberg n’y croyait plus ? Avait-il abandonné et accepté son sort d’être le pilote avec le plus grand nombre de courses sans trophée ? Personne ne le saura, mais l’histoire ne pouvait être plus belle. Entre résilience et persévérance, ce podium arrive un peu par hasard le jour où on l’attendait le moins. Parti 19ème et avant-dernier sur la grille avec une des monoplaces les moins performantes du paddock, il a réalisé ce que plus personne ne pensait comme possible.
Photo Steve Domenjoz
Une carrière de mérites… sans juste récompense
Depuis ses débuts en 2010 chez Williams, Hülkenberg a toujours impressionné par un talent et des performances de qualité. Poleman à Interlagos dès sa première saison, régulier, rapide, précis… mais jamais au bon endroit, au bon moment. Champion du monde de Formule 2 en 2009 et vainqueur des 24 Heures du Mans, son palmarès devrait être plus étoffé. Que ce soit chez Force India, Sauber, Renault ou Haas, les voitures ne suivaient pas, ou les occasions s’évaporaient.
Parmi ses nombreuses désillusions, il y a cette pole-position sans suite au Brésil en 2010 et l’édition 2012 à Interlagos. Alors en tête et à la bataille avec Lewis Hamilton, il sort de piste et perd toute chance de podium. Il y a aussi eu cette sortie déchirante à Hockenheim en 2019, alors qu’un podium à domicile semblait acquis sous la pluie. A la lutte encore une fois avec Lewis Hamilton, il sort dans l’un des derniers virages de son Grand-Prix à domicile. A la suite, son écurie ne le prolonge pas et il se retrouve sans volant pendant près de deux ans. Autour de cette pause forcée entre 2020 et 2022, il parvient à briller comme joker de luxe chez Racing Point, se classant dans les points et 3ème mais en qualification. Il sera ainsi récompensé par un baquet chez Haas pour deux saisons dès 2023 et aurait pu à nouveau terminer sur le podium à Melbourne en 2023 si la course avait été arrêtée au bon moment.
NORTHAMPTON, ENGLAND – JULY 06: Third placed Nico Hulkenberg of Germany and Stake F1 Team Kick Sauber on the podium with his trophy during the F1 Grand Prix of Great Britain at Silverstone Circuit on July 06, 2025 in Northampton, England. (Photo by Clive Rose/Getty Images)
Fidèle à Sauber – et sauvé par Sauber
L’Allemand si attachant dans le paddock l’est aussi dans l’écurie helvétique Sauber. Le team de Hinwil a toujours occupé une place à part, puisqu’il déclarait y être à la maison. Il y avait ainsi déjà roulé en 2013, avec une superbe saison à la clé et une nouvelle 4ème place en Corée du Sud. Deux autres 4ème places « maudites » en Belgique (2012 et 2014) figurent dans son palmarès malgré une 7ème place au classement général pilote en 2018 avec Renault.
Finalement, avec son retour dix ans plus tard chez Sauber avec le projet Audi 2026, beaucoup y voient un pari risqué et l’abandon de son objectif et vœu cher de podium. Mais pour Hülkenberg, ce retour aux sources l’est aussi par passion. Sa réaction après la course en dit d’ailleurs long: « Cela fait du bien. Cela faisait longtemps qu’on l’attendait, n’est-ce pas ? Mais je savais toujours que nous en étions capables, que j’en étais capable, quelque part. ». Et c’est donc là, au volant de cette voiture longtemps moquée, que le miracle a eu lieu et face à nouveau à…Lewis Hamilton dans les derniers tours de course. Cette fois-ci, la chance a souri à Nico Hüllkenberg, enfin.
Une émotion partagée par la famille
Lorsqu’on lui demande comment cela fait de monter enfin sur un podium de F1 après 239 Grands Prix, l’Allemand répond que: « c’est assez surréaliste, en étant honnête. Je ne suis pas sûr de comprendre comment tout cela est arrivé ». Sa fille de 4 ans qui a suivi toute la course chez elle, a bien compris. Son papa a enfin réussi et décrocher ce podium si longtemps attendu et espéré…un miracle. Cela valait bien quelques larmes à l’arrivée et certainement des retrouvailles remplies d’émotions avec sa famille. En attendant, Mercedes et Aston Martin ont apporté du champagne pour fêter ceci dans l’hospitalité Sauber, l’écurie suisse n’ayant assez logiquement pas prévu la chose.
On disait que Hülkenberg était l’un des pilotes le plus sous-estimé, qu’il n’avait pas eu une voiture à la hauteur de son talent et qu’il creuserait ce record à jamais. Faux, le déluge de Silverstone lui a donc donné raison et confirmé pourquoi on aime tant le sport. Et tant pis si sa coupe et trophée est en légo, nouveau partenariat avec la firme danoise oblige.
Et maintenant, quelle suite pour cette romance Sauber-Hülkenberg ?
Ce premier podium enfin arrivé, presque tombé du ciel peut-il en appeler d’autres ? C’était avant-tout un un moment d’émotion pure, de rédemption tardive et de fidélité récompensée. Mais alors que le pilote allemand a inscrit son nom dans l’histoire, une question brûle les lèvres : et maintenant ? Quelle suite à cette romance tardive ?
Engagé pour 2025 par Audi – qui prendra pleinement le contrôle de l’écurie Sauber à partir de 2026 – Hülkenberg est censé incarner l’expérience et la stabilité dans un projet en pleine construction. Il a la confiance des dirigeants d’Ingolstadt et Hinwil, connaît bien l’environnement de l’équipe et a su, malgré les années, conserver un excellent niveau de performance.
Mais voilà : ce résultat a aussi remis l’unique pilote allemand sur la carte. Dans le jeu de chaises musicales du mercato F1, plusieurs écuries pourraient être tentées de lui faire les yeux doux. Est-ce que Alpine ou Red Bull si des sièges venaient à se libérer lui feront une offre. À 36 ans, l’Allemand pourrait-il être tenté de vivre une dernière aventure ailleurs, dans une équipe déjà compétitive, plutôt que de s’engager dans la montée en puissance encore incertaine d’Audi ? Le dilemme est réel. D’un côté, Hülkenberg incarne le pilier idéal pour un projet comme celui des Allemands, avec la perspective, en 2026, de participer à une montée en puissance similaire à celle vécue par Mercedes une décennie plus tôt. De l’autre, ce podium montre qu’il a encore de quoi viser haut — dès maintenant. Pas dans deux ans. Pour l’instant, tout laisse à penser que le choix de Nico Hülkenberg sera celui du cœur et de la logique. L’histoire n’est pas terminé après ce premier exploit qui en appelle peut-être d’autres dès l’an prochain. Après tout, un miracle en appelle un autre et il est bien encore permis de rêver.
Credit photos: @F1, @Pirelli, Steve Domenjoz, Kick Sauber